Cela fait maintenant quelques jours que certains des nôtres ont pu tenter de fuir le Mont Weather. Certains avec plus de chance que d'autres, visiblement. Pour ma part, en sachant que l'Arche est sur Terre maintenant, je n'avais qu'une envie : être de la partie et tenter ma chance pour partir d'ici. Mais, j'ai du me résoudre à mettre cette envie de côté. Pour ne pas abandonner ceux devant rester sur place. Impossible pour nous de tous partir de toute façon, au risque d'attirer l'attention sur nos nombreuses et soudaines absences. Et puis surtout, je n'avais pas envie de laisser Arthur, tout seul, ici. Cela fait quelques jours qu'il est sous la surveillance médicale de ces Montagnards. Mais, en sachant certaines choses à leur sujet, je ne pouvais vraiment pas me résoudre à l'idée de laisser mon petit protégé entre leurs mains. Avec mon bagage médical que j'ai accumulé avec mes études sur l'Arche, mais aussi -et surtout- toute ma curiosité donc j'ai fait preuve depuis toute gamine pour ce domaine, je veille sur Arthur. Les médecins d'ici ne peuvent pas facilement me berner avec des mots incompréhensibles pour ceux qui n'y sont pas habitués. Je veille sur lui, un peu comme une mère le ferait. C'est un peu la façon dont il me voit. Il me l'a déjà dit. Même avant d'atterrir ici-bas. Impossible donc pour moi de le laisser derrière et de sauver ma peau. Tout comme les autres restés ici. Je me doute que les locaux risquent de nous surveiller de près. Sans doute se risqueront-ils à des plans aussi douteux que ceux qu'ils font avec les Natifs. Je n'en sais rien. Mais, dans le doute.. Je suis restée. Ils tentent de nous manipuler, je le sens. En tentant de prêcher le faux pour en retirer le vrai. La prudence du moindre mot qu'on leur répond est donc primordiale et assez épuisante moralement.

Toujours est-il que j'ai pu rejoindre les quelques étudiants en médecine du bunker. Une façon pour eux de m'occuper, de me donner l'illusion de m'intégrer à la masse. De m'avoir à l’œil, sans doute aussi. Mais, pour moi, j'arrive à en tirer un avantage assez important : poursuivre mon parcours de connaissances. Pour ne pas que je m'ennuie pendant ces cours, alors qu'ils ont du remarquer que j'avais pas mal d'avance sur mon âge -merci maman, merci ma soif de connaissances et merci mon grand sérieux en cours !-, ils m'ont même intégré dans le groupe d'études qui est un peu plus âgé que moi. Bref. C'est après cette nouvelle longue journée à étudier que j'ai fini par pouvoir enfin me rendre dans la chambre d'Arthur. Il semble presque faiblir à vue d’œil et sa santé m'inquiète réellement. Pour le coup, je ne pense pas que les Montagnards soient derrière tout ça. Mais, ça ne s'explique pas. J'aimerai tellement que ma mère soit là.. Elle pourrait l'aider, j'en suis sure ! Ce n'est qu'une bonne heure plus tard que je finis par sortir de là. Un peu déprimée, anxieuse aussi. Et avec ce sentiment d'impuissance dont j'ai horreur. Je sais que certains nouveaux venus sur Terre ont rejoint le Mont Weather. Malgré ce qu'il se passe ici. Bientôt d'ailleurs, ils quitteront leur zone de quarantaine pour nous rejoindre. Si je n'ai pas eu de nouvelles de ma mère depuis son arrivée sur Terre, j'ai peur qu'elle soit dans ce groupe. Ça me stresse rien que d'y penser. Elle en serait capable, même si je sais qu'elle doit être débordée à l'heure actuelle. J'espère que Macy et Zack vont bien. Eux deux, je sais qu'ils ne sont pas là. Ils ne peuvent pas se permettre de venir jusqu'ici. Surtout pas Macy, alors que je sais qu'elle est enceinte. Puis, il y a aussi Bellamy. Lui, par contre, je ne sais pas ce qu'il pourrait faire. Nous rejoindre pour nous sortir de là ? Rester avec sa sœur maintenant qu'il a pu la retrouver ? C'est son visage que j'ai en tête, et certains souvenirs qui me reviennent, alors que je marche dans ces longs couloirs qui me semblent interminables. Et alors que je tourne, première à gauche -ces couloirs n'ont plus de secret pour moi, tellement je retrouve Arthur dès que possible-, pour rejoindre le dortoir, je ne fais pas vraiment attention où je mets les pieds. Si bien que je manque de foncer dans quelqu'un. L'un de nos alliés, d'ailleurs. « Oh, Killian .. » que je lâche, surprise de le croiser ici, tout en me reculant rapidement d'un pas. « Désolée, j'ai la tête un peu.. ailleurs. » Haussant les épaules, je ne trouve que ça à lui dire pour tenter de m'excuser de mon petit coup de maladresse. Par chance, même si des gens étrangers à cette fameuse ligue passent dans le coin, ils peuvent très bien comprendre ces quelques mots dans le sens où, simplement, je m'inquiète pour Arthur. Ça, je crois que le bunker entier le sait, à quelques exceptions près ! Même si, en réalité, c'est tellement plus compliqué que ça..

Vous êtes-vous déjà posé la question de savoir pourquoi certaines choses vous arrivent, sans même crier gare ? Moi, en tout cas, c'est une question qui trotte dans ma tête depuis quelques jours. Depuis qu'Arthur est malade. Depuis qu'on sait que certains Archéens sont aux portes du bunker -enfin, en quarantaine maintenant-. Depuis que certains des nôtres sont partis. Et plus largement, depuis qu'on est ici. Non pas que certains résidents des lieux rendent notre tourisme au Mont Weather particulièrement désagréable, mais en fait : si. Totalement, même. On aurait du s'en douter. Pourquoi de parfaits inconnus nous auraient porté secours sans rien attendre en retour de notre part ? Le monde dans lequel on est contrait de vivre n'est pas franchement sur le partage gratuit. Du moins, ça vaut pour certains entre ces murs. D'autres nous ont prouvé qu'on pouvait leur accorder un peu de notre confiance. Preuve ultime : ils ont pris des risques, sur leurs propres vies, pour faire sortir certains d'entre nous de là. Et ça, ce n'est pas tout le monde qui peut en être capable, de loin pas..

Pas le temps de rêvasser pour autant, surtout pas après ma visite à Arthur qui m'a un peu mis le moral en-dessous de 0. Qu'il est difficile de faire bonne figure, de prendre sur soi pour changer les idées des proches tourmentés. Surtout quand sa propre tête est en vrac. Et si j'essaie de mettre un masque autant que possible, il y a des moments plus flottants, comme là. Aucun doute qu'il n'échappe pas à ce cher Killian. « Salut Clarke. » qu'il me lance, m'arrachant un petit sourire en réponse au sien. « J'ai appris pour Arthur … » Mon regard se détourne une fraction de seconde du sien, alors que je resserre un peu ce livre dans mes bras. Nul besoin de lui demander comment il a pu savoir qu'Arthur ne va pas très bien. On aurait du partir, tous les deux, dans cette première vague de fuites. Mais, vu son état.. Impossible. « C'est horrible ce qui lui arrive … Il s'en sort comment ? » Haussant doucement les épaules, je ne sais même pas vraiment quoi lui répondre. Parce que je suis confrontée à un mal qui le ronge que je ne connais juste pas. Et les médecins du bunker semblent tout aussi impuissants que moi. « Il reprend quelques couleurs. Même s'il n'est pas encore en forme pour passer son temps à courir partout. » Une réponse en apparence bien innocente, mais qui entre nous lui explique juste qu'il n'est pas encore prêt s'ils comptent faire partir un deuxième groupe du bunker un de ces prochains jours. Croisant son regard, mon sourire se montre un peu plus marqué. Un peu comme pour le remercier, silencieusement, de ne pas m'interroger sur comment je vais moi, car clairement : ce n'est pas la priorité. Et lui dire que je vais bien serait juste un mensonge. « Ça te dirait d’aller boire quelque chose pour parler un peu … ? » Bonne idée. Même si je ne passe pas mon temps libre en sa compagnie depuis qu'on est là, je dois reconnaître qu'être avec lui est assez rassurant, dans le sens où personne ne vient nous embêter au sujet de nos comparses en fuite lorsqu'on est  avec des résidents. Surtout que là, très sincèrement, subir un interrogatoire détourné est bien la dernière chose dont j'ai besoin. « Avec plaisir ! » De simples mots, mais qui sont sincères. Il est gentil ce gars, donc autant papoter un peu autour d'un verre plutôt que d'aller broyer du noir au dortoir. On ne tarde pas trop à se mettre en marche. Et comme rester ainsi silencieuse pourrait potentiellement être intriguant pour certains, je ne tarde pas trop à lancer une conversation pour le moins ultra basique tant que les murs peuvent avoir des oreilles. « Ta journée s'est bien passée ? » Quand je disais qu'on part sur du basique, tant qu'on est dans ces longs couloirs. Et encore, même dans une pièce bien fermée dans ces zones pour tous, on n'est jamais à l'abri de rien. « Pas d'attaque de grands méchants de la surface dernièrement ? » Autant tenter de noyer le poisson en utilisant de tels termes pour montrer, à ces possibles oreilles curieuses, à quel point je trouve la surface si dangereuse que je n'ai aucune envie d'y retourner..